Vers l’âge de quatorze ans, le jeune André COTTAVOZ est attiré par la peinture et s’essaye à la copie d’un paysage tiré de l’Illustration. Puis, c’est la révélation face à la reproduction d’une peinture de Van Gogh qu’il découvre dans la vitrine d’un magasin de Romans. De retour au domicile familial, il emprunte un couteau et se met à peindre, ou plutôt à sculpter la matière; pratique qui ne le quittera plus.
Viennent ensuite des études chez les Maristes et un retour à Saint-Marcellin. La famille s’installe à « la Bergère » maison familiale de la grand-mère maternelle du jeune homme.
Doué d’un sens artistique certain, il reçoit le soutien de sa mère qui fait le sacrifice de l’envoyer à Lyon à tout juste 17 ans.
Lors de sa première année d’étude au Beaux-arts de Lyon, la France plonge dans le chaos de la guerre? C’est la défaite, Lyon se retrouve en « zone libre ». Le jeune rapin est réquisitionné et intégré dans le service du travail obligatoire (STO), en Autriche à Kapfenberg dans la province de Styrie, à 117 km au Sud-ouest de la capitale.
La région est montagneuse et glaciale en hiver. A deux pas du camp, chaque jour, les jeunes gens se rendent à l’usine pour fabriquer des pièces d’armement. Les conditions de travail sont difficiles, la vie est dure. Chacun résiste du mieux qu’il peut, c’est la peinture qui aide Cottavoz.
Parmi ses compagnons de misère, il rencontre et se lie d’amitié avec Philibert Charrin qu’il initie à la peinture.
Réalisées avec les moyens du bord, dans la cantine du camp, le jeune homme peint tentant d’immortaliser quelques scènes de la vie quotidienne de ses pauvres compagnons d’infortune. Corravoz et Charrin organisent une petite exposition. Les Allemands ne goûtent guère ce témoignage sur la vie du camp et, le lendemain de Noël 1943, les SS rentrent dans le foyer-cantine, détruisent et brûlent l’ensemble des tableaux.
Lorsque les Russes libèrent le camp, les prisonniers craignant autant les Russes que les Allemands, s’enfuient et errent dans le dénuement le plus absolu jusqu’à leur jonction avec les soldats américains. Il faudra plusieurs mois à Cottavoz pour rejoindre sa famille.
En 1946, il brosse un tableau : « Jeunes filles russes chantant en chœur en Autriche » réalisé de mémoire en souvenir de l’un des tableaux peint dans le camp et détruit par les Allemands.
Fortement marqué par ses années de captivité, Cottavoz a du mal à s’adapter à sa nouvelle vie. Remotivé par sa mère, c’est sous son impulsion qu’il retourne s’installer à Lyon afin de réintégrer l’école des Beaux-arts. Il rencontre Jean Fusaro et Jacques Truphémus dans la classe de peinture d’Antoine Chartre.
Rejoints par Philibert Charrin, ils restent un an à étudier ensemble et forment un groupe d’amitié avec des aspirations communes. D’autres se joignent à eux : Lachieze-Rey, Adilon, Coquet… Tous élèves de cette école des Beaux-arts ils aiment se retrouver pour travailler.
Avec Philibert Charrin, Cottavoz décide en 1948 de rassembler un groupe d’artistes pour exposer au lycée Ampère.
Philibert Charrin invente le terme « Sanziste ». Face au cubisme, au surréalisme, au pointillisme…, mouvements artistiques en « isme »; ne voulant se rattacher à aucun de ces groupes : « Nous, on a dit – dit Charrin – nous serons sans isme ».
Comme pour la plupart des jeunes artistes, il leur faut survivre avant de pouvoir vivre de leur art. En attendant, avec son ami Charrin, Cottavoz rénove des appartements. C’est à cette époque qu’il se lie d’amitié avec Frédéric Dard, un journaliste qui débute dans la carrière d’écrivain.
Après deux années d’exposition à la Chapelle du lycée Ampère, Cottavoz et ses amis montent à Paris. Pour rompre avec le provincialisme qui a étouffé le talent de leurs maîtres : Laplace, Didier, Chartres…, ils sont de tous les Salons, participent aux concours, essayent par tous les moyens de se faire connaître. Cottavoz est introduit dans le milieu russe de la capitale, il tisse une amitié profonde avec les artistes, notamment avec les peintres André Lanskoy et Jean Pougny pour lesquels il a une profonde admiration.
La réussite arrive enfin en 1953 avec le prix Féneon qui lance véritablement la carrière de l’artiste. Il expose régulièrement à Paris, au Salons : d’Automne, des Tuileries, des jeunes peintres…
Entre temps, André qui s’était marié quelques années auparavant, se sépare de son épouse, s’éloigne de Paris, et quitte définitivement Lyon
En 1958, Cottavoz se rapproche de son père qui vit à Cannes. Pour l’artiste, c’est un véritable coup de cœur pour la Méditerranée : ses paysages et surtout sa lumière.
En 1962, il se fixe à Vallauris et loue un petit atelier au 13 de la rue Sicard.
En 1964, il illustre le dialogue de l’arbre de Paul Valéry et quatre ans plus tard, l’Odyssée de Kazantzakis, puis des ouvrages de James Hadley Chase, de Françoise Mallet-Joris ou d’Albert-Camus.
En 1966, il ouvre son propre atelier où il travaillera la céramique avec Roger Collet. C’est dans l’atelier qu’il rencontre sa deuxième femme avec laquelle il vivra plusieurs années avant de l’épouser et de lui donner en 1968, un fils.
En 1976, Cottavoz s’essaye à d’autres techniques avec Yves Schuldiner qui a son atelier rue Lascaris. Avec lui, il décore des plaques émaillées en lave de Volvic.
Il délaisse la céramique pour un temps, avant d’ revenir dans les annéees 1990 avec Francis Milici son nouveau complice.
Entre temps, Cottavoz a exploré d’autres techniques, d’autres domaines. Il réalise de nombreuses gravures: gravures au carborundum et lithographies, le plus souvent tirées par l’atelier Mourlot à Paris, puis avec Art-Litho, à l’atelier Baviera de Nice, puis chez Pierre Chave à Vence.
Après une collaboration fructueuse avec plusieurs galeristes parisiens, Cottavoz signe un contrat avec la galerie Taménaga.
Lors de ses premiers voyages à Paris dans les années cinquante, Kiyoshi Taménaga, collectionneur fortuné, avait acheté des œuvres de Cottavoz.
En 1990, Cottavoz est invité pour 2 mois au Japon par son galeriste afin de réaliser une commande, une : Vue du mont Fuji-Yama, un tableau de cinq mètres sur cinq mètres.
1990 est un tournant dans la vie de Cottavoz, Hélène qui codirige la galerie Longchamp à Nice, connaît et aime la peinture de l’artiste.
Elle rencontre l’homme pour la première fois lors d’une réception à la galerie Taménaga. Deux ans plus tard, elle devient madame Cottavoz.
Hélène Cottavoz va changer la vie de l’artiste.
D’abord son cadre de vie : la maison des Brusquets « une maison de célibataire » va trouver son âme. Hélène, avec délicatesse va transformer le cadre de vie de l’artiste pour le métamorphoser en un havre de paix où il fait bon vivre, où chaque meuble, chaque objet est choisi et disposé avec goût. Quant au jardin en terrasse, Hélène va l’aménager, veiller sur chaque arbre, chaque plante, pour créer avec un patience un extraordinaire jardin méditerranéen.
Hélène devient sa muse.
Source : Hommage à André Cottavoz